Pour ma seconde participation au challenge Challenge "Vie de château" , je vous présente un téléfilm en deux parties qui offre un autre point de vue sur le personnage de madame de Maintenon : L'allée du roi, réalisé par Nina Companeez en 1996 et adaptée de manière très fidèle du roman éponyme de Françoise chandernagor.
Ici, madame de Maintenon est non seulement le personnage principal mais aussi la narratrice du téléfilm. Elle commente ainsi les différents événements de sa vie, non sans ironie parfois. Ne dit-elle pas qu'elle est née "sur la paille" (sans jeu de mots).
Françoise d'Aubigné a souffert. Famille protestante, ruinée. Mal aimée par sa mère, qui lui préférait son frère aîné, mort tragiquement. Recueillie par une tante
bigote qui ne rêve que d'en faire une bonne religieuse. La première partie ne nous montre pas une irrésistible ascension, elle nous rend attachante cette petite fille mal aimée, mal fagottée qui
a préférée épouser un infirme plutôt que s'enfermer dans un couvent, un infirme qui avait su reconnaître l'intelligence de cette gamine timorée et l'initier à la vie des salons parisiens.
Françoise (Dominique Blanc) est jeune, amoureuse, loin de l'image austère de madame de Maintenon. Amoureuse déçue, car pour son amant (Samuel Labarthe), elle est de trop basse extraction pour qu'il envisage de l'épouser. Bien sûr, je n'ai pas pu m'empêcher de sourire, sachant qui daignera l'épouser, en dépit de sa "basse extraction".
Françoise veuve Scarron découvre Versaille grâce à son amie Bonne d'Heudicourt (Raphaeline Goupilleau). Bien sûr, la scène que je me passe et repasse est le ballet, au château de Versaille, où le roi fête sa double victoire : sur le champ de bataille mais aussi dans le lit de la marquise de Montespan. La musique qui illustre le ballet n'est autre que la passacaillle d'Armide :
Moment intéressant, car pour la première fois, le regard du roi croise celui de Françoise Scarron. Une future proie ? Pourtant, la jeune femme n'a pas vraiment le profil des conquêtes royales et c'est un tout autre rôle qu'elle jouera, dans l'ombre : gouvernante des enfants que Louis XIV ne peut reconnaître, puisque Françoise-Athénaïs de Montespan (Valentine Varela, fille de la réalisatrice). Vie de l'ombre, vie douloureuse (l'aînée mourra, le second, futur duc de Maine, ne marchera que grâce aux soins patients de Françoise Scarron), vie de mère par procuration - dans ce film, Louis XIV voit d'abord Françoise Scarron comme une mère pour ses enfants, bien plus que leur mère biologique ne l'a été.
La deuxième partie s'ouvre sur une reconnaissance : le roi a trouvé moyen de reconnaître ses enfants (Madame de Montespan en mettra huit au monde) et Françoise Scarron, qui est restée leur gouvernante, vit désormais à la cour avec eux. La Montespan, que ses nombreuses grossesses ont épaissi, n'est pas avare en piques et autres pointes, autant dire que la transformation de la veuve Scarron en madame de Maintenon lui reste en travers de la gorge, d'autant plus que les trahisons du roi (la trop belle Angélique de Fontanges) se multiplient.
Le temps n'est plus aux réjouissances, l'affaire des poisons éclatent. Madame de Maintenon fonde Saint-Cyr, qui est son enfant, elle a ainsi un visage plus humain que dans le film de Patricia Mazuy.
Que lui reste-t-il, maintenant qu'elle est au sommet ? Se conformer aux bons plaisirs du roi, et l'épauler en toutes circonstances. L'ombre recouvre Versaille, les déceptions suivent, les
défaites, les deuils se succèdent, tout d'abord sans rien changer (le chagrin ne dure jamais à Versaille), puis deviennent de plus en plus pesant, surtout quand le plus puissant souverain
d'Europe n'a plus qu'un frêle enfant pour héritier. Louis XIV meurt, et Madame de Maintenon se retire à Saint-Cyr. Ce n'est qu'à la fin que le titre prend tout son sens.
Je ne suis pas particulièrement fan des dernières productions de Nina Companeez (j'ai zappé A la recherche du temps perdu et pas vraiment apprécié La poursuite du vent, la série qu'elle réalisa juste après L'allée du roi), pourtant j'ai une tendresse particulière pour cette oeuvre, l'une des rares à montrer l'intimité du souverain en dehors des "représentations" de la Cour.
Ma prochaine étape dans le challenge sera la lecture des tomes 7, 8 et 9 des Colombes du roi Soleil d'Anne-Marie Desplat-Duc. J'ai lu les six premiers tomes (avant de tenir mon blog), je ne vais pas m'arrêter si près de la fin de la série