édition Albin Michel - 310 pages
Présentation de l'éditeur :
Dans un train immobilisé en rase campagne entre Paris et Nantes à la suite d'un « incident de personne » (un suicide), un homme, qui revient de Chypre en ayant tout perdu, raconte sa vie à
l'inconnue assise à côté de lui. Il lui parle de la nostalgie et de la mélancolie, évoque les fantômes de l'enfance, ponctuant son récit des vies de personnages magnifiques - le Japonais qui
convainc les candidats au suicide de ne pas se jeter du haut des falaises, le Chypriote qui offre au narrateur la douille de la balle qui a servi à assassiner son frère.
Il raconte tranquillement, sans emphase, sans colère, et la jeune femme l'écoute, ne pose que de rares questions. Pendant ces heures d'attente dans la nuit, quelque chose se tisse entre eux. Mais
bientôt, le train repart...
Eric Pessan nous entraîne dans un roman intelligent, subtil, et d'une belle humanité. Le romancier ici nous parle de son propre chagrin en nous racontant « d'autres vies que la sienne".
Circonstance de lecture :
Aujourd'hui est le dernier jour du challenge 1 % 2010. J'espère atteindre les 2 % avec ce titre.
Mon avis :
Le premier et le dernier livre lus dans le cadre d'un challenge sont importants pour moi. Le premier, c'était Nous étions des êtres vivants de Nathalie Kuperman , le dernier sera celui-ci, moins connu que les romans qui firent les beaux jours de la rentrée.
Pourtant, il a un point commun avec Le coeur régulier : ce japonais qui voue sa retraite à sauver des candidats au suicide, personnage indispensable du roman d'Olivier Adam, est ici évoqué. Une manière de dire aussi pour moi que j'ai nettement préféré le livre d'Olivier Adam.
J'ai trouvé Incident de personne trop bavard. C'était un parti pris de narration : le long monologue intérieur du narrateur, suivi d'un dialogue avec sa voisine - difficilement repérable, car les codes du dialogue ne sont pas respectés. J'ai eu l'impression de lire cet exercice de style trop souvent, comme si les moindres pensées d'une personne, ses moindres commentaires (sur un voisin indiscret, un enfant qui pleure) étaient captivants. Il est vrai aussi qu'avec ce procédé, le temps de la lecture coïncide quasiment avec le temps de la narration.
Le narrateur anime des ateliers d'écriture. Son but n'est pas de former des écrivains, mais d'amener des gens ordinaires à mettre des phrases l'une derrière l'autre, et ces phrases, le plus souvent, révèlent des secrets trop longtemps contenus. Des années, qu'il fait ce métier, des années, que les histoires des autres le hantent. Cet incident de personne, euphémisme pour suicide, est l'occasion pour lui de libérer auprès de cette parfaite inconnue, qui l'agaçait quand elle s'est installée à ses côtés, son trop plein de mots et de se pencher plus particulièrement sur le suicide. Ce n'est pas le meilleur sujet pour un homme qui a tout perdu (la présentation de l'éditeur en révèle bien trop). Avoir transmis son fardeau à sa voisine, quasiment réduite au rôle d'oreille complaisante pendant leur brève rencontre, changera peut-être quelque chose - ou pas.