Titre : La fille de son père.
Auteur : Anne Berest.
Editeur : Seuil.
Nombre de pages : 161.
Quatrième de couverture :
Trois soeurs que la vie a éloignées se retrouvent chez leur père à l'occasion d'un dîner d'anniversaire. dans la maison d'enfance, les souvenirs affleurent. Les gestes deviennent nerveux, les langues fourchent et les rancoeurs s'invitent autour de la table.
Au dessert, un secret de famille est révélé. Une bombe à retardement qui va, sourdement, modifier le quotidien de chacune des filles.
Un premier roman acéré, qui sonde les rapports doux-amers de trois jeunes femmes et d'un père.
Mon avis :
Je n'aime pas écrire un avis négatif sur un premier roman - et pourtant, je n'ai d'autres choix que de l'écrire, ou bien renoncer.
Le roman débute au présent, et énonce les deux fils narratifs qui vont tendre ce récit. Pas de véritable surprise pour moi donc, pas même lors du dénouement : j'avais presque deviné la fin dès le début. Même le fait que la narratrice portât une robe marron ne m'a pas choqué - je ne porte jamais de noir aux enterrements non plus.
Le sujet est simple : trois filles, orphelines de mère, toutes trentenaires, sont invités à un repas de famille chez leur père et belle-mère, qu'elles détestent. La tension monte, et Catherine, la belle-mère maladroite, révèle un secret de famille : Martine, leur mère bien-aimée, trompaient leur père et l'une des filles est illégitime.
L'écriture est sobre, sans émotion. Pas ou peu de communication dans cette famille, donc peu de dialogues. Chacun parle avant tout pour soi, et se garde bien d'attendre les réponses.
J'ai envie de comparer ce livre aux Faux-Monnayeurs, d'André Gide. Là aussi, un personnage découvre que son père n'est pas son père - et le père le sait. La complexité de leurs relations et la force de l'amour de ce père pour ce "fils" y sont narrés avec une profondeur et une émotions rares.
Là, rien. Les seuls moments de quiétudes sont quand les trois soeurs se remémorent leurs souvenirs communs, à trois, sans que vraiment leurs parents interviennent. Les explications aux rapports conflictuels entre les soeurs, puis entre les soeurs et leur père, sont énoncés dans de lourdes sentences à visée généralisatrice. Le père est sur le mode de la colère, voire de la violence, physique et verbale. La mère est morte et désincarnée parce que le père l'a confisquée, gardée pour lui seul, interdisant même à ses filles de regarder les albums de photos ou de prendre les objets qui appartenaient à leur mère. La fille aînée est toute aussi vindicative, persuadée d'être la fille illégitime, et d'avoir donc subi une éducation plus rigoureuse, des châtiments plus sévères que ses soeurs cadettes. La narratrice se complaît dans la neutralité, puisque même ses histoires d'amour sont dénuées d'amour. Elle n'a jamais la force d'agir, elle se laisse porter par les décisions prises par l'une ou l'autre de ses soeurs. Seule Charlie, la benjamine, apporte un peu de fraîcheur, en dépit de son histoire d'amour irréelle. Elle est sans doute moins concernée par cette quête parce qu'elle n'a que peu de souvenirs de sa mère, et parce qu'elle a su créer des liens avec Catherine, plus maladroite que réellement méchante. Par son prénom et son métier, elle est un peu le garçon (manqué) de la famille.
Ce premier roman m'a déçue, j'attends néanmoins la prochaine oeuvre de cette jeune romancière.