Le mois Kiltissime touche à sa
fin, et pour mon ultime participation, je voulais vous parler de mon roman préféré de Jules Verne, Les Indes noires.
Voici dix ans que la mine d'Aberfoyle a fermé car ses gisements sont épuisés. Pourtant, Simon Ford, ancien Overman, demande à l'ingénieur James Starr de revenir : il est persuadé qu'un autre gisement existe. Dès lors, on ne cessera de mettre des embuches sur leur chemin pour empecher Simon, Harry, son fils et James de poursuivre leurs explorations. Ils seront même emmurés vivants dans la mine et ne devront leur salut qu'à Jack Ryan, venu leur porter secours au bout d'une semaine. Je vous entends : pourquoi Jack n'est pas venu leur porter secours plus tôt ? Tout simplement parce qu'il avait failli se noyer en portant secours à des naufragés, et qu'il lui a fallu quelques jours pour se remettre ! Vous l'aurez compris, je préfère nettement Jack Ryan, le courageux et superstitieux piper, conteur hors pair, à Harry Ford sans-aucun-défaut.
Le titre du roman viendrait du surnom que les anglais donnaient à leurs mines de charbon, leurs "Indes noires". Ce roman exalte le courage mais aussi
l'obéissance des mineurs écossais (comparés aux mineurs français, trop prompts à se plaindre) et leur volonté de continuer à exercer leur métier, en dépit de leur dangerosité : les accidents ne
viennent pas des économies réalisées par les patrons sur le bois pour étayer les galeries, sur la nécessité de faire toujours plus vite pour extraire le charbon. Non : les coups de grisou et les
effondrements ne sont dus qu'à l'imprudence des mineurs. Partial, Jules Verne ? A peine : il avait un lectorat à soigner, et même si, comme Emile Zola, il a visité une mine pour écrire son roman,
le résultat sera totalement différent.
Les douze premiers chapitres sont entrecoupés d'explications (comme presque toujours dans les romans de Jules Verne). Après les avoir lus, vous saurez presque tout sur la formation du charbon, le grisou, les pénitents et autres moyens de prévenir les coups de grisou. Trois ans passent entre la délivrance des héros et le chapitre XIII, où la nouvelle Aberfoyle est crée. Avatange : elle a crée de nouveaux emplois (piqueurs, boiseurs, remblayeurs) qui tous vivent dans la merveilleuse cité sous-terraine. Inconvénient : et bien, ils vivent tous sous terre et cela ne les dérange absolument pas. Jules Verne n'est pas tout entier tourné vers le roman scientifique, il n'oublie pas de citer Walter Scott, ou d'évoquer Marie Stuart. Il appuie également la construction du roman sur les superstitions écossaises, les dames du Feu, qui fréquentent les ruines du château, ou les lutins errants. Ne serait-ce d'ailleurs pas un lutin qui est venu les nourrir, pendant les huit jours passés sous terre ?
N'en déplaise à Jak Ryan, le lutin prendra figure humaine, au cours d'une expédition organisée par Harry Ford : il avait cru entendre des battements d'ailes et des gémissements au fond d'un puits. Les gémissements, c'était Nell, une toute jeune fille, descendante du dernier pénitent Silfax et élevée par lui dans la mine. Les battements d'aile étaient ceux du harfang, dévoué à Silfax mais aussi à son arrière-petite-fille. L'histoire d'amour entre Harry et Nell est presque trop attendue, mais, que voulez-vous, il fallait bien qu'Harry trouve une jeune fille qui consente à vivre sous terre avec lui, dans la nouvelle Aberfoyle. Il n'allait tout de même pas épouser son ami Jack Ryan. les chapitres 17 et 18 seront consacrés à un grand voyage en Ecosse pour que Nell, qui n'a jamais quitté la mine, découvre le monde extérieur. Leur périple les mènera jusqu'au lac Katrine - le lac de la Dame du lac de Walter Scott et là, la catastrophe survient, menaçant de détruire la toute nouvelle mine.
A la folie de Silfax, qui donne un aura fantastique à ce roman s'oppose l'esprit rationnel d'Harry et surtout l'amour de Nell, amour qu'elle voue à la famille Ford, qui lui a offert tout ce que son aïeul ne lui a jamais donné. C'est elle qui sauvera la mine - et Jack Ryan pourra écrire la légende de Silfax.