édition Le livre
de poche - 224 pages
Mon avis :
Je termine le challenge des Nobel 2010-2011 avec ce roman que j'ai beaucoup apprécié. Le vagabond qui joue en sourdine est le narrateur. Il nous raconte l'histoire qu'il vit et observe, de son point de vue de simple domestique, ancien vagabond qui le redeviendra une fois la parenthèse refermée, sans amertume aucune.
L'intrigue est simple, en apparence : Knut revient, six ans après, au domaine où il a travaillé. Il a été épris de l'épouse du capitaine, maître des lieux, amour qui est bien sûr passé inaperçu : il n'était qu'un domestique. J'aimerai dire qu'en six ans rien n'a changé, ce serait faux. Le domaine partirait à vau l'eau sans l'acharnement des domestiques. La vie est rythmée par les saisons qui abîment les bâtiments et ramènent invariablement les mêmes travaux des champs ou des forêts. Le capitaine ne se préoccupe plus que des réceptions qu'il donne et des invités qu'il reçoit. Il délaisse sa femme, madame Falkenberg, qui joue du piano et a trois servantes pour elle seule. Ils n'ont pas d'enfants. Le narrateur y voit la cause de cet abandon dans lequel le capitaine laisse son domaine, tout en délaissant d'autant son régiment. Knut observe les intrigues amoureuses qui se nouent, les mensonges, les faux-semblants. Des couples se forment, d'autres se séparent.
Deux mondes s'opposent, bien forcés pourtant de cohabiter : les maîtres, les domestiques. Si les maîtres ont tout pouvoir et font preuve souvent de légèreté envers leurs employés, qu'ils renvoient pouir réembaucher aussitôt ou rétribuer avec négligence, les domestiques espionnent et s'espionnent, jalousent, se jalousent, toujours sous la menace d'une renvoi au gré des caprices de madame. Ils ont le tort de connaître des secrets inavoués, surpris ou confiés par leurs maîtres.
J'ai ressenti une curieuse modernité dans les décisions de madame : sa vie amoureuse, bien qu'elle soit mariée, est assez mouvementée. Elle la vit pourtant avec la bénédiction de ses parents. Pourtant, les femmes sont loin d'être privilégiées dans ce roman, et le regard des domestiques (encore eux) est sans appel : nous glissons lentement mais sûrement vers la tragédie. Elle était déjà présente, pourtant, y compris dans les descriptions (sublimes) des paysages. Elle était là, en sourdine.
Roman délicat, Un vagabond joue en sourdine m'a rappelé les plus belles pages de Tchekhov. Grâce au challenge des Nobel, j'ai à nouveau fait une très belle découverte littéraire.
Une nouvelle participation au Challenge des notes
et des mots
Une belle découverte pour la Norvège
Ma dixième participation au challenge des Nbel.