édition J'ai Lu - 446 pages
Quatrième de couverture (extraits) :
Au milieu d'un train bondé, une petite fille Lilian disparaît. En dépit d'une centaine de témoins potentiels, personne n'a remarqué quoi que ce soit. Sa mère Sarah
était descendue sur le quai pour passer un coup de fil, et n'a pu regagner le train à temps. Affolée, elle a alerté les contrôleurs qui ont gardé un oeil protecteur sur l'enfant endormie.
Pourtant, à l'arrivée en gare de Stockholm, la fillette s'est volatilisée. On ne retrouve que ses chaussures sous la banquette... Une équipe de police, assistée par l'enquêtrice Fredrika Bergman,
est chargée de l'affaire.
Challenges littératures nordiques par Myuiki
Circonstance de lecture :
J'ai trouvé ce livre hier, par hasard, dans une très grande librairie, dotée d'un bon rayon "littérature scandinave". J'en ai lu la moitié dans le train, je l'ai terminé hier soir.
Challenge en train de lire par Aux bouquins garnis
Mon avis :
Je pense que nous avons là une nouvelle équipe d'enquêteur sur laquelle il faudra compter. Premier point, très positif pour moi : ils ont chacun leur problème, mais aucun ne noie ses soucis dans une addiction à l'alcool. Deuxième point : nous découvrons la police dans toute sa routine, et rien de pire, dans une enquête comme celle-ci, que la routine.
Alex, c'est un vieux de la vieille, le chef de la brigade, une légende vivante près de qui Peder est fier de travailler. Les disparitions d'enfants, il a l'habitude : la plupart du temps, la négligence des parents est responsable. On finit toujours par les retrouver, parfois, très loin, parfois en mauvais état, mais l'issue est globalement heureuse. Alors ce n'est pas Frédérika, la petite nouvelle, froide, distante, avec sa théorie tirée par les cheveux, qui va remettre en cause ce qu'il croit. La police manque d'effectifs, on nous impose des personnes venues de la société civile, qui n'ont rien à faire ici, on voit les dégâts que cela cause.
Ajoutez à cela qu'Alex et ses co-équipiers sont misogyne. A Frederika, on confie certains interrogatoires, certaines missions, parce qu'elle est une femme. On lui confie de plus grandes responsabilités uniquement quand personne d'autres n'est disponible. Le changement de point de vue nous permet de voir la distance entre ce que ses collègues croient qu'elle ressent, et ce qu'elle ressent réellement - rien qu'à leurs erreurs d'interprétation, je pouvais mettre en doute leur capacité à se remettre en cause. De plus, quelques chapitres, fort brefs, nous permettre de connaître le point de vue des kidnappeur, et leurs propos sont suffisamment nébuleux pour que l'inquiétude naisse.
Et se confirme. Quand le pire arrive, et que la première théorie s'écroule, il leur faudra tout reprendre à zéro, et vite. Ou, plutôt, s'intéresser enfin à la théorie de Frederika, aidé du programmateur informatique. Pas (trop) le temps de la réprimander parce qu'elle a poursuivi ses investigations en solo : elle a fait son travail malgré tout, et elle leur a permis d'avancer.
Nous retrouvons alors des thèmes fréquents dans la littérature suédoise : la maltraitance des enfants et son corollaire, l'impuissance de la société suédoise à
remédier à leur souffrance, la prostitution des très jeunes filles, la différence entre les classes, et même si des mains secourables se tendent, il est souvent trop tard, ou le mal est trop
grand. Je suis toujours choquée quand je vois (et pas seulement dans ce roman, dans ceux de Mons Kallentoft aussi) que les instituteurs détournent les yeux plutôt que de signaler les problèmes.
D'un autre côté, tant qu'ils n'ont pas été signalé, ils n'existent pas, il n'y a donc aucun soucis dans le système éducatif suédois.
Premier roman d'une écrivain suédoise, Les enfants de cendre interroge sur la place des femmes dans la société suédoise, sur l'évolution de leur condition et de leur droit. Theodora, la grand-mère de Lilian, est la figure même du passé et de la perversion : toutes les méthodes sont bonnes, toutes les tricheries également, pour préserver son apparence et son rang. Sarah, Nora, Jelena, ont toutes été la proie d'un homme pervers, violent, et elles ont eu des difficultés (euphémisme) à retrouver leur liberté. Yvla, la femme de Peder, souffre d'une dépression post-partum, et si son mari s'est montré très attentif, même s'il ne comprend pas la cause de sa dépression (elle avait imaginé un enfant, elle a eu des jumeaux),elle en revanche, ne lui a jamais accordé le droit d'avoir ses propres coups de blues dues à des enquêtes pénibles. La sollicitude ne doit pas être à sens unique. Ellen, divorcée et "invisible" ou presque dans l'équipe, tente de sortir de sa solitude et de refaire sa vie, tout en veillant attentivement sur ses deux enfants. Quant à Frederika, elle a 34 ans, et se pose pour elle la question d'avoir un enfant - ou pas. Hors-norme, elle vit une liaison avec un homme marié plus âgé, sans éprouver le besoin de le dissimuler.
Reste un point important dont je n'ai pas parlé : le mobile du coupable. Si je le dévoile, la lecture du livre perd tout son intérêt. Sachez seulement qu'il a su trouver, dans le livre, une personne pour approuver ce qu'il fait et pourquoi il le fait. Même une, pour moi, c'est déjà trop. J'espère qu'aucune personne qui lira ce livre ne sera de son côté.
Défi Scandinavie noire et
blanche
Le challenge Voisins voisines organisé par Anne.