Je croyais en avoir fini avec les portaits. Et bien non. A la demande générale d'une lectrice (en espérant que cela plaise à d'autres), je reviens sur ce qui marque la tragédie du règne de François-Joseph : la mort de son fils unique Rodolphe.
J'essaierai dans ce billet d'énoncer les faits de manière la plus stricte possible.
D'abord, qu'est-ce que Mayerling ? Un relais de chasse qui appartenait à Rodolphe. Le jour de sa mort, il s'y est rendu pour chasser avec ses deux amis.
Que s'est-il passé dans la nuit du 29 au 30 janvier 1889 ? Il est très difficile de le savoir avec précision. La seule certitude est qu'au matin, Rodolphe était mort avec la jeune Marie Vetsera, sa maîtresse. Son valet de chambre les a trouvés aux alentours de six heures du matin, puis il a fait prévenir le comte Hoyos, un des amis chasseurs du prince.
Pourquoi le prince héritier s'est-il donné la mort ? Aujourd'hui encore, personne ne le sait. Son mariage était un échec, il savait qu'il n'aurait pas d'autres enfants (sa femme était stérile, soit à la suite de la naissance difficile Erzsi, soit à la suite d'une maladie vénérienne, transmise par Rodolphe), Mary Vetsera aurait été enceinte, elle aurait été la demi-soeur (par l'empereur) de Rodolphe, il était en conflit avec son père. Quelle raison l'a emporté ?
Soyons juste : deux thèses s'affrontent. Le suicide, ou l'assassinat. Cette dernière thèse est défendue par Jean des Cars dans Elisabeth d'Autriche ou la fatalité. Rodolphe aurait été mêlé à un complot contre son père puis, ayant renoncé, il aurait été éliminé car devenu gênant. Celle du suicide est défendue par presque tous les autres auteurs.
Si assassinat il y a, les comploteurs furent très doués. En effet, Rodolphe avait demandé précédemment à une de ses maîtresses Mizzi Caspar de mourir avec lui durant l'été 1888. Celle-ci s'était empressée de prévenir la police, qui n'avait pas pris la chose au sérieux. Pourtant, Rodolphe mourut six mois plus tard, en ayant pris des dispositions testamentaires en faveur de sa fille unique. "Seule la mort peut laver mon honneur et je l'envisage avec sérénité" écrit-il dans la lettre d'adieu à sa fille, qui lui ressembla beaucoup et lui voua une passion infinie.
Revenons aux certitudes. L'impératrice fut prévenue en premier. Bouleversée, elle prit soin de prendre sur elle avant d'avertir l'empereur (source : mémoire de sa dame de compagnie et journal de sa fille Marie-Valérie). Pour les ménager tous deux, on leur dit que leur fils avait été empoisonné, ce n'est que le lendemain qu'ils apprirent son décès d'une balle dans la tête. Afin de pouvoir l'enterrer religieusement, l'empereur plaida la folie temporaire auprès du pape, qui autorisa l'inhumation. François-Joseph racheta Mayerling, en fit un couvent de carmelites. Elisabeth prit le deuil et ne le quitta jamais.
Et
Marie Vetsera ? On aurait presque tendance à l'oublier. Elle a recontré Rodolphe l'été 1888 (toujours ce fameux été) et c'est grâce à la comtesse Marie-LouiseLarish qu'elle aurait réussi à lui
être présentée. Cette mystérieuse comtesse n'est autre que la fille unique du frère aîné de Sissi. Née le 19 mars 1871, la fille du baron Albin Vetsera et de la baronne Hélène n'avait que 17 ans
quand elle fut retrouvée sans vie auprès de l'archiduc Rodolphe. Sa présence, morte, embarrassait. La suite de l'histoire ne réhausse pas l'image de la monarchie austro-hongroise. On l'habilla à
la sauvette, on dépêcha ses oncles qui voyagèrent assis de part et d'autres du cadavre dans une voiture et enterrèrent Marie dans le cimetière de Heilingenkreuz. L'empereur exigea le départ de sa
mère loin de Vienne et refusa toujours son retour en grâce. Il exigea également que lui soit remise la lettre d'adieu écrite par la jeune fille à sa famille. Quant à la comtesse Larish, elle fut
disgraciée. Pour se refaire une fortune - à défaut d'une réputation - elle écrivit ses mémoires remplies de révélation plus ou moins crédibles.
Je terminerai sur une note macabre : au couvent de Mayerling était une statue de la Vierge. Celle-ci avait les traits de Sissi. Elle avait un poignard planté dans le coeur, et ce, bien avant la mort de Sissi.